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La garantie décennale couvre les désordres évolutifs : Cas. 3è civ., 11 mars 2015 (n°13-28351 et 14-14275)

Cet arrêt rappelle, dans un cas où la construction remontait à 1993, que la garantie décennale couvre, après l’expiration du délai d’épreuve de dix ans à compter de la réception de l’ouvrage, les dommages évolutifs… et que les experts judiciaires peuvent engager leur responsabilité civile à l’occasion de l’accomplissement de leur mission.

Une piscine construite en 1993 a fait l’objet, deux ans après la réception, d’une expertise judiciaire ayant conclu qu’elle était affectée d’un défaut d’ossature en raison duquel elle n’était pas autoportante et qu’elle était soumise aux effets néfastes de l’instabilité des sols environnants. Des travaux de renforcement sont effectués en 1999 conformément aux préconisations de l’expert judiciaire mais les désordres persistent et s’aggravent, de sorte qu’un nouvel expert est judiciairement désigné en 2007.

La Cour de cassation censure la décision de la cour d’appel qui avait réformé sur le fondement de la prescription le jugement rendu en première instance en ce qu’il avait déclaré recevable l’action du maître de l’ouvrage à l’encontre de l’assureur de responsabilité civile décennale constructeur et l’avait condamné au paiement d’une indemnité au titre de la réparation de l’ouvrage. Pour la Cour de cassation, la cour d’appel a violé l’article 1792 du code civil en réformant ce jugement alors même qu’elle avait constaté que les désordres, apparus deux ans après la réception de 1993, s’étaient aggravés et avaient perduré malgré les travaux de reprise effectués en 1999.

Ainsi, la Cour de cassation confirme très clairement par cet arrêt rendu vingt deux ans après la réception de l’ouvrage et vingt ans après l’apparition des désordres, que lorsque des désordres apparus dans le délai d’épreuve de dix ans à compter de la réception, réapparaissent au-delà malgré la réalisation de travaux de reprise, il n’y a pas de forclusion et le constructeur ou son assureur de responsabilité civile décennale sont tenus d’indemniser le maître de l’ouvrage dès lors que les désordres persistants trouvent leur siège dans l’ouvrage où les premiers désordres d’une nature identique étaient apparus dans ledit délai d’épreuve.

A noter que l’arrêt de la cour d’appel est cassé par ailleurs en ce qu’il a exclu la responsabilité du premier expert judiciaire, alors que celui-ci n’avait pas apprécié convenablement la gravité et le caractère évolutif des désordres, ni n’avait formulé des préconisations adéquates afin d’y remédier. On l’oublie en effet parfois : accepter une mission d’expertise judiciaire n’est pas sans risque.